instant de vie
2 min
Je dois devenir une Néphélé
Farah El Yacoubi
Je dois devenir une Néphélé, une divinité de la mythologie grecque, une nymphe du ciel formée de nuages. Cette divinité travaille avec diligence. Elle descend du ciel aux fleuves, elle cherche de l'eau et elle en distribue là où l'on en a besoin. Quand elle est impatiente ou en colère, elle se rebelle. Elle distribue l'eau d'une façon moins généreuse ou plus chaotique. Quand elle ne travaille pas, elle a beaucoup de liberté. Elle peut se déplacer seule et discrètement. Elle a la chance de pouvoir flotter dans le ciel comme elle veut. Elle n'a pas de forme spécifique et personne ne la voit.
Je dois devenir une Néphélé, car c'est sous cette forme que j'aurai enfin la chance de visiter ma terre natale : La Palestine, dont ma famille a été exilée. Exil que mes parents ont été contraints de vivre à leur plus jeune âge.
Rashid Khalidi, historien palestinien majeur a longuement rappelé à travers ses écrits la difficulté que vivent les Palestiniens au contact des frontières. En tant que Palestinien issu de la diaspora, tu es constamment défini par ta condition d'exilé. Chaque passage de frontière est un rappel de cette condition. Alors, comment pourrais-je accepter ces frontières agressives m'interdisant tout retour dans ma terre natale ?
J'y ai pensé longuement et de façon obsessive et je suis certaine que la seule solution qui se présente devant moi est de devenir une Néphélé.
Je dois devenir une Néphélé, car je serais enfin libre de mes mouvements. Ni les frontières territoriales ni les frontières maritimes ne s'appliqueraient à moi. Je pourrais éviter la gendarmerie aux aéroports qui bloquent les Palestiniens comme moi voulant se rendre à la terre natale. Je pourrais également voltiger discrètement au-dessus des soldats qui contrôlent rigidement les mouvements des Palestiniens à travers le pont entre la Jordanie et la Cisjordanie et le mouvement des Palestiniens entre les points de contrôle en Cisjordanie. Je pourrais même survoler la frontière fortifiée, « la barrière de séparation » de 7 à 9 mètres de hauteur qui divise cette terre en petits îlots isolés. Quelle liberté contre ces barrières inamovibles !
Je dois devenir une Néphélé, afin de me déplacer au gré du vent au-dessus de ma terre natale et surplomber ces champs d'oliviers si caractéristiques de ma patrie, qui survivent tant bien que mal à ces barrières humaines.
Je dois devenir une Néphélé, pour enfin pouvoir m'approcher de ces arbres porteurs d'une huile qu'il est pourtant si facile d'acheter. Chaque année, ma famille achète plusieurs litres de cette huile d'olive. Quelle absurdité que de ne pouvoir s'y rendre autrement !
Je dois devenir une Néphélé, car c'est sous cette forme que j'aurai enfin la chance de visiter ma terre natale : La Palestine, dont ma famille a été exilée. Exil que mes parents ont été contraints de vivre à leur plus jeune âge.
Rashid Khalidi, historien palestinien majeur a longuement rappelé à travers ses écrits la difficulté que vivent les Palestiniens au contact des frontières. En tant que Palestinien issu de la diaspora, tu es constamment défini par ta condition d'exilé. Chaque passage de frontière est un rappel de cette condition. Alors, comment pourrais-je accepter ces frontières agressives m'interdisant tout retour dans ma terre natale ?
J'y ai pensé longuement et de façon obsessive et je suis certaine que la seule solution qui se présente devant moi est de devenir une Néphélé.
Je dois devenir une Néphélé, car je serais enfin libre de mes mouvements. Ni les frontières territoriales ni les frontières maritimes ne s'appliqueraient à moi. Je pourrais éviter la gendarmerie aux aéroports qui bloquent les Palestiniens comme moi voulant se rendre à la terre natale. Je pourrais également voltiger discrètement au-dessus des soldats qui contrôlent rigidement les mouvements des Palestiniens à travers le pont entre la Jordanie et la Cisjordanie et le mouvement des Palestiniens entre les points de contrôle en Cisjordanie. Je pourrais même survoler la frontière fortifiée, « la barrière de séparation » de 7 à 9 mètres de hauteur qui divise cette terre en petits îlots isolés. Quelle liberté contre ces barrières inamovibles !
Je dois devenir une Néphélé, afin de me déplacer au gré du vent au-dessus de ma terre natale et surplomber ces champs d'oliviers si caractéristiques de ma patrie, qui survivent tant bien que mal à ces barrières humaines.
Je dois devenir une Néphélé, pour enfin pouvoir m'approcher de ces arbres porteurs d'une huile qu'il est pourtant si facile d'acheter. Chaque année, ma famille achète plusieurs litres de cette huile d'olive. Quelle absurdité que de ne pouvoir s'y rendre autrement !
Ce texte a été rédigé par un(e) étudiant(e) ayant participé à l'atelier d'écriture de création "Autour des nuages : atelier d'écriture" dispensé par Mathieu Simonet au Centre d'écriture et de rhétorique de Sciences Po au semestre d'automne 2022.
Ici, on lit et on écrit des histoires courtes
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